Prés-bois des Bâties

Nous sommes au cœur de la haute-chaîne du massif du Jura. Le socle rocheux qui est visible ici et là, date de l’ère géologique du Kimméridgien. Il est constitué dans ce secteur d’un calcaire marin riche en fossiles qui s’est déposé il y a 145 millions d’années.
Ces roches se sont formées dans une mer chaude, peu profonde, parsemée d’îles et de récifs que l’on peut comparer aux tropiques actuels. À cette époque, le Jura est une plate-forme marine ouverte sur un ancien océan : la Téthys.

La nature, l’herbe, les arbres et arbustes… sont la base de l’alpage, mais son existence même dépend de l’activité humaine. L’alpage évoque traditionnellement un ensemble constitué d’un chalet, de pâturages, de prébois et forêts. Il n’existerait pas si les exploitants agricoles ne venaient pas y faire paitre leurs animaux.

On trouve sur l’alpage des Bâties des pelouses dites mésophiles : les plantes qui vivent ici recherchent des conditions moyennes d’humidité-sécheresse (préfixe méso : moyen) et présentent des typologies différentes en fonction des conditions de sol (nature, pente, profondeur), de l’exposition ou de l’altitude. On y trouve une grande biodiversité…
Sur les prairies, on voit également de grandes plantes, très visibles car non consommées par les animaux : chardons, gentianes jaunes et verâtres.

Les chalets d’alpage abritent sous le même toit des parties réservées au bétail, une partie logement, ainsi qu’une ou 2 pièces pour la fabrication des fromages. La présence d’un « pont de grange » et la taille imposante de la grange laissent penser que le chalet de la Bâtie Dessous aurait pu être occupé à l’année… Les 2/3 de la surface au sol sont consacrés aux animaux. Et en hiver ? Chalets et alpages sont abandonnés par les hommes et leurs troupeaux dès les premières gelées, généralement courant octobre.

Le domaine est constitué de 3 anciennes fermes achetées par le Département du Doubs en 1991 : la Bâtie Dessous, la Bâtie Dessus et Bougaud. Chacune de ces propriétés était à l’origine un chalet d’alpage se composant d’un bâtiment, d’une surface de terrain à usage agricole (pâtures), de zones de boisement clair ou pré-bois et de forêt pleine. Le lieu est maintenant labellisé « Espace Naturel Sensible » d’intérêt départemental. La commune de Mouthe est propriétaire du site depuis le 13 décembre 2018.

Située entre Mouthe et la frontière suisse, dans la continuité de la forêt du Risoux et du Mont d'Or, la forêt des Bâties se développe sur un plateau situé à plus de 1 000 m d'altitude.
L'origine de son nom viendrait de la présence de plusieurs bâtisses dispersées dans les prairies, dont l'une au nom évocateur de « Bâtie bourgeois ». Ces constructions sont localisées au milieu d'enclaves prairiales et de pré-bois et donnent un aspect champêtre au lieu. La végétation y est marquée par le climat rude de la région, les premières floraisons n'apparaissant que tardivement dans la saison.
Les épicéas se sont quant à eux adaptés aux importantes chutes de neige en adoptant un port plus resserré que leurs congénères de plaine. La neige y attire les amoureux du ski de fond qui viennent y pratiquer cette activité pendant les mois d'hiver.

Aux Bâties, l’ancienne forêt départementale devenue communale s’étage de 1 080 à 1 280 mètres. Très présente dans le paysage, la forêt présente un enjeu économique fort de production de bois d’œuvre résineux (voire feuillus) et de bois de chauffage. Elle représente aussi un enjeu écologique important et reconnu (lutte contre l’érosion, puits de carbone, réservoir de biodiversité...), elle est lieu de vie des tétraonidés (grand tétras et gélinotte). La fonction d’accueil du public est également à prendre en compte.

Les prés-bois sont une spécificité du massif et constituent des zones de transition douces (visuelles et physiques) entre prairies et forêt. Épicéas isolés ou bosquets de hêtres, dispersés au milieu des pâturages, alternent avec forêts denses sur les crêtes et combes dénudées. Cette répartition n’est pas naturelle et résulte d’un délicat équilibre entre sylviculture et exploitation pastorale. Il s’agit de permettre l’apparition de végétation pour nourrir les animaux en évitant qu’il y ait trop d’arbres sur une zone, et donc en permettant à la lumière d’arriver au sol.

Élément caractéristique des paysages de l’arc jurassien, le « murger » est un terme régional désignant un tas de pierres, empilées les unes sur les autres, enlevées des pâturages et terres cultivées pour laisser pousser l’herbe. Délimitant les « vies », frontières de pâturage et de cultures, ou les enclos de fauche, les murs de pierre sèche animent le paysage de l’alpage et sont menacés de disparition (éboulement et enfouissement progressif) en de nombreux endroits où l’alpage n’est plus pâturé.